Trois
objectifs pour le Darfour
La Croix, 10
juillet 2007
Le conflit au Darfour et ses extensions
au Tchad a des causes locales mais s’inscrit dans le contexte plus global du
Soudan. Le Conseil de l’Union européenne l’a bien relevé en juin 2007: « Une paix durable dans tout le Soudan
incluant le Darfour et l’Est du pays, ne peut pas être achevée sans
l’application totale de l’accord de paix relatif au Sud. Son non respect aura
des effets au Darfour. (…) Il est particulièrement important de réaliser le redéploiement
des forces militaires prévu pour juillet 2007 et d’accélérer la préparation des
élections nationales. »
Signé par le gouvernement soudanais et
les rebelles du Sud début 2005 cet accord n’est pas correctement appliqué,
selon les rapports des Nations Unies. Des ONG soudanaises rencontrées il y a
quelques mois l’expriment malgré les menaces qui pèsent sur elles : « Le vrai problème est le gouvernement
fondamentaliste de grands commerçants au pouvoir depuis 1989 et qui veut
appliquer la charia. (…) Au Darfour on oublie les vraies causes de la
crise ; la réponse internationale humanitaire passe à côté en tenant un
discours sur les droits de l’homme et la démocratie, sans effet sur le
pouvoir. »
A côté de ses importantes opérations
d’aide et de secours au Darfour et au Tchad – où le Secours catholique
participe à la coordination - auprès de plus de 400 000 personnes, le
réseau Caritas associé à ACT/International, son équivalent protestant, conduit
des actions d’alerte politique. Là comme ailleurs il n’y a pas d’action
humanitaire, sociale ou de lutte contre la pauvreté sans articulation avec
l’analyse des causes et le plaidoyer : la promotion de la justice exige que
l’on change «les structures de pouvoir
établies qui régissent aujourd'hui les sociétés » (Populorum progressio, n°58)
Caritas Internationalis et ses
partenaires mettent ainsi en avant trois objectifs.
D’abord viser une paix durable par une
négociation unique associant toutes les parties, donc différente de celle de
2006 qui n’impliquait que certains mouvements d’opposition. Les acteurs clés
doivent être là, Nations Unies, Union africaine – tristement absente de la
réunion à Paris en juin 2007! – Union européenne, Etats-Unis,
Chine, Ligue arabe. Cette dernière doit jouer un rôle majeur alors que la
crise n’est pas religieuse. Au Darfour il s’agit d’une guerre entre musulmans
et ceux-ci ont donc une responsabilité politique toute particulière pour
trouver les chemins de
Ensuite protéger les populations civiles
par le déploiement d’une force internationale au Soudan et à ses frontières. Le
Conseil de Sécurité des Nations Unies l’a prévu en associant les forces de l’Union
africaine déjà sur place à des casques bleus. Le gouvernement soudanais a donné
un accord de principe. Il faut veiller aux conditions de mise en œuvre.
Enfin faire pression sur les personnes
recherchées par la Cour pénale internationale en imposant des sanctions
individuelles, tels le gel des avoirs à l’étranger ou l’interdiction de voyager.
Mais il y là deux limites. D’une part l’ambiguïté des Etats-Unis qui ont voté contre la création
de cette Cour en 1998. D’autre part le risque de vouloir imposer des sanctions
globales: un comble que l’exemple dramatique des sanctions contre l’Irak de Saddam
Hussein ne serve pas de leçon ! Caritas Internationalis avait en 2001 pris
position contre ce système qui frappe d’abord les plus pauvres. Il ne faudrait
pas que la même faute se reproduise au détriment de la population soudanaise.